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En plus de la correction professionnelle de tous vos textes, je propose quelques astuces avec ce blog pour répondre aux questions que vous vous posez sur la langue française.

 

 

 

Comment écrire des dialogues (typographie) ?

14/04/2023

Comment écrire des dialogues (typographie) ?

Toute personne qui écrit se demande à un moment comment composer proprement ses dialogues, comment les rendre cohérents, clairs et lisibles.

Avec cet article, je réponds à ces questions en vous présentant la méthode que je trouve la meilleure pour la plupart des cas de figure.


Les points abordés :
Qu’est-ce qu’un dialogue ?
Guillemets et dialogues
L’enchaînement des répliques
Les incises
La ponctuation des incises

Lorsque je corrige, je chasse non seulement les fautes, mais aussi les erreurs typographiques et les incohérences. Bien souvent, j’en retrouve dans les dialogues, car l’auteur ou l’autrice n’a pas défini les règles à suivre en amont. 


Pour vous éviter de vous emmêler les pinceaux, je vous propose avec cet article non pas un panorama des différents moyens de présenter vos répliques, mais plutôt celui que je préfère, que je trouve le meilleur.

Suivez ces quelques règles et vous disposerez d’une boîte à outils polyvalente qui vous assurera d’écrire des dialogues propres et cohérents.

 

Cet article parle notamment de retour à la ligne, avec des exemples, c’est pourquoi je vous conseille de le lire sur un écran d’ordinateur, et non un téléphone.

 

 

Sommaire

Qu’est-ce qu’un dialogue ?
Guillemets et dialogues
L’enchaînement des répliques
Les incises
La ponctuation des incises
En résumé
Sources

 

 

1. Qu’est-ce qu’un dialogue ?

Le Robert définit le dialogue comme un « ensemble des paroles qu’échangent les personnages d’une pièce de théâtre, d’un film, d’un récit ; manière dont l’auteur fait parler ses personnages ». 


Ce sont donc des paroles rapportées, des citations. Je vous invite à lire cet article qui reprend les règles à appliquer pour utiliser correctement les citations, car elles s’appliquent aux dialogues.


Maintenant que nous sommes à jour sur les notions élémentaires, continuons.

 

 

2. Guillemets et dialogues

Je préfère quasi systématiquement utiliser les règles typographiques dites traditionnelles pour les dialogues, à savoir les composer entre guillemets, comme les citations qu’ils sont. 


Vous prendrez soin de faire précéder la première réplique par un guillemet français ouvrant (et l’espace insécable ou fine qui le suit) et d’ajouter un guillemet fermant (et l’espace insécable ou fine) après la dernière réplique.


Je sais que la mode est de se passer des guillemets, mais je persiste à penser que prendre la peine de les utiliser permet une grande souplesse dans l’écriture et d’éviter les ambiguïtés ; j’y reviendrai.

 

 

3. L’enchaînement des répliques

Sauf exception, chaque réplique est précédée d’un alinéa (retour à la ligne volontaire) et d’un tiret cadratin (l’espace entre le tiret et la réplique doit être insécable ou fine).

Sur Mac, vous pouvez insérer un tiret cadratin en maintenant la touche option et en appuyant sur la touche -.

Si vous utilisez Windows, utilisez la combinaison suivante : alt + maj + -. 


Autrement dit, revenez à la ligne à chaque changement d’interlocuteur et utilisez un tiret cadratin. (Le demi-cadratin est parfois utilisé.)

Seules les répliques qui s’ouvrent avec un guillemet sont dispensées de tiret. 


J’insiste aussi sur l’espace insécable : il vous permet d’éviter les très inélégants décalages et mauvais alignements des répliques qu’engendrent les espaces justifiantes. (Je retrouve souvent ce type d’oubli, même dans les livres publiés par de grandes maisons d’édition, notamment numériques. Ne faites pas comme elles, ajoutez une espace insécable.)
Pour plus d’infos sur les espaces et leurs utilisations, je vous renvoie à cet article.

 

 

« Voici un exemple de dialogue.

— Mais, à qui parles-tu ? »

 

Vous constatez ici que la séquence de dialogue est délimitée par des guillemets, et que le changement d’interlocuteur est marqué par un retour à la ligne (alinéa) et un tiret cadratin. La première réplique n’est pas précédée d’un tiret, car elle est ouverte par le premier guillemet.

 

 

4. Les incises

Une incise est une « proposition généralement courte, tantôt insérée dans le corps de la phrase, tantôt rejetée à la fin, pour indiquer qu’on rapporte les paroles de quelqu’un ou pour exprimer une sorte de parenthèse » (Le Robert). 

 

A) Les incises courtes

Si l’incise est courte et ne termine pas la séquence de dialogue, inutile de fermer les guillemets.


« Je vous assure que c’est pour votre bien, essaya-t-elle, faites-moi confiance.
— Vous nous prenez pour des idiots ! siffla-t-il en réponse. Personne n’est dupe, vous n’offrez de cadeaux qu’à vos amis.
— Vous n’y connaissez rien », affirma-t-elle, péremptoire.


(Dans la pratique, évitez d’utiliser une incise à chaque réplique, ça alourdit le style comme vous pouvez le constater avec ce bref échange.) 

 

Dans cet exemple, vous notez que je n’ai pas fermé les guillemets à chaque incise, mais seulement à la fin du dialogue. La dernière proposition incise se place après la fin de l’échange, elle est la seule exclue des guillemets. 
D’ailleurs, on remarque tout de suite le bénéfice des guillemets : il n’y a pas d’ambiguïté sur « péremptoire ». On comprend que le mot appartient à l’incise et non à une réplique, même si cette incise comprend une virgule, car le guillemet fermant est placé avant. 


J’ajoute que les incises dont le début est fondu dans une réplique voient leur sujet inversé ; vous savez, le fameux « dit-il ».

 

B) Les incises longues

Si l’incise est longue, vous pouvez fermer les guillemets et les rouvrir un peu plus loin au besoin. Cela permet d’introduire de nombreuses nuances au sein d’une même réplique ou entre deux.


« Je vous assure que c’est pour votre bien », soupira-t-elle d’une voix mielleuse, mais ferme ; ses yeux trahissaient pourtant un certain manque de conviction. « Faites-moi confiance.
— Vous nous prenez pour des idiots ! Personne n’est dupe, vous n’offrez de cadeaux qu’à vos amis. » Il en avait vu, des menteurs, mais rarement avec un tel aplomb ; le voilà en rogne.
« Vous n’y connaissez rien », affirma-t-elle, péremptoire.

 
Ici, je ferme les guillemets avant la première incise longue, et, sans retourner à la ligne, je poursuis la réplique en utilisant un guillemet ouvrant. On comprend ainsi que c’est la même personne qui parle. Le retour à la ligne avec le tiret cadratin ne se fait qu’au changement d’interlocuteur.
Après la deuxième incise, qui est placée en fin de réplique, les guillemets ne sont rouverts qu’après le retour à la ligne qui marque le changement d’interlocuteur (le tiret est inutile ici, puisque la dernière réplique est encadrée de guillemets et qu’à l’intérieur de ces guillemets, c’est un même personnage qui parle).

 

 

Bien sûr, le même degré de précision est possible sans les guillemets, mais jugez vous-mêmes :


— Je vous assure que c’est pour votre bien.
Ses yeux trahissaient un certain manque de conviction, mais sa voix mielleuse resta ferme.
— Faites-moi confiance.
— Vous nous prenez pour des idiots ! Personne n’est dupe, vous n’offrez de cadeaux qu’à vos amis.
Il en avait vu, des menteurs, mais rarement avec un tel aplomb ; le voilà en rogne.
— Vous n’y connaissez rien, affirma-t-elle, péremptoire.


Vous constatez dans cette version qu’un même texte prend plus de place, puisqu’il faut retourner à la ligne pour introduire les incises longues afin qu’elles ne nuisent pas à la clarté des répliques. Sur un échange, on ne gagne qu’une seule ligne, mais à l’échelle d’un manuscrit entier, ça fait une belle différence. À une époque où les coûts d’impression s’envolent, ce n’est pas anodin et ça ne fait pas de mal d’avoir l’esprit un peu pratique.


De plus, pas facile de s’y retrouver immédiatement. Les deux premières répliques sont dites par le même personnage, mais seul le contexte nous permet de comprendre, pas la typographie.

Cela nuit donc à la clarté et à la fluidité de la lecture, sauf à ajouter une incise supplémentaire pour préciser qui parle ; dans ce cas, bonjour les lourdeurs. (Un comble quand on sait que les guillemets sont réputés lourds : je trouve qu’au contraire ils permettent plus de légèreté.) 


Enfin, pour l’incise courte qui termine ce dialogue, c’est encore une fois le contexte, et non la typographie, qui permet de déterminer si « péremptoire » est une réplique ou non. Voilà de quoi sortir les lecteurs et lectrices du livre.

 

 

Vous l’aurez compris, je préfère largement la version avec les guillemets : plus compacte, plus précise, elle élimine toutes les ambiguïtés et permet une lecture fluide, notamment pour les incises.

Mais l’auteur ou l’autrice reste libre d’utiliser n’importe quelle méthode, il s’agit simplement de rester cohérent.

 

 

5. La ponctuation des incises

A) Les incises courtes
Les propositions incises courtes sont généralement introduites par une virgule. 


Si la réplique reprend après, l’incise est suivie d’une virgule et il n’y a pas de majuscule car la phrase n’a pas été interrompue.


« Je vous assure que c’est pour votre bien, essaya-t-elle, faites-moi confiance. »

 

 

Si la proposition incise courte termine une phrase, elle est introduite également par une virgule, mais se termine par un point. La phrase suivante commence donc par une majuscule.


« Je vous assure que c’est pour votre bien, essaya-t-elle. Faites-moi confiance. »

 

 

Pour une réplique qui se termine par un point d’exclamation ou d’interrogation, n’ajoutez pas de virgule pour introduire l’incise et terminez-la par un point.


« Vous nous prenez pour des idiots ! siffla-t-il en réponse.
— Vous n’y connaissez rien. »

 


Si la séquence de dialogue se termine, l’incise est à l’extérieur des guillemets, ce qui ne change rien aux règles à appliquer.

 

« C’est pour votre bien », essaya-t-elle.

 

 


B) Les incises longues
Dans le cas d’une incise longue pour laquelle vous avez fermé les guillemets, le principe reste le même. 


Retenez que, comme pour les citations, il s’agit de réfléchir à quoi se rapporte la ponctuation.

Ainsi, vous placez la virgule qui introduit l’incise à l’extérieur des guillemets car elle n’appartient pas à la réplique.


« Je vous assure que c’est pour votre bien », soupira-t-elle d’une voix mielleuse, mais ferme ; ses yeux trahissaient pourtant un certain manque de conviction. « Faites-moi confiance. »

 

 

Mais vous intégrez le point d’interrogation ou d’exclamation à la réplique, s’il permet au personnage de donner le ton.


« Vous nous prenez pour des idiots ! » siffla-t-il en réponse alors que son interlocutrice levait les yeux au ciel. « Personne n’est dupe. »

 

 

6. En résumé

Je conseille de composer les dialogues entre guillemets, ce qui permet flexibilité et précision.


À chaque changement d’interlocuteur, retournez à la ligne et commencez la réplique par un tiret cadratin et une espace insécable ou fine.


Les propositions incises sont introduites par des virgules, sauf si la réplique précédente se conclut par un point, un point d’exclamation ou un point d’interrogation. Elles n’interrompent pas les guillemets si elles sont courtes, mais vous pouvez fermer les guillemets et les rouvrir plus loin dans la même réplique si les incises sont longues.

 

 

Sources

LACROUX, Jean-Pierre, Orthotypographie, sous licence creative commons qu’on peut consulter sur http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/2.0/fr/, 2007.


Le Petit Robert de la langue française 2023, Paris, Le Robert, 2022.



« Typographie du dialogue », Guide de typographie, Antidote 11, version 3.1.1 [Logiciel], Montréal, Druide informatique, 2022.

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